
– À quel âge as-tu commencé à écrire et comment cette passion est-elle née ?
J’ai commencé à écrire à sept ans, mais honnêtement, c’était absolument nul. Et puis, mon père a fait ce que font tous les parents : il en a trop parlé. Il était tellement fier qu’il a raconté ça à tout le monde, en faisant des éloges démesurés sur les bêtises que j’écrivais. Résultat ? J’ai été méga gênée, et j’ai arrêté d’écrire jusqu’à mes treize ans.
– Tu te souviens de ton premier projet abouti ?
Oui, j’ai enfin fini une histoire à cet âge-là… mais elle s’est perdue. Je ne sais même pas où elle est et je ne me rappelle même plus de ce que j’avais écrit ! J’ai mis du temps avant de me remettre à écrire sérieusement.
– Qu’est-ce qui t’a poussée à reprendre ?
J’ai réprimé l’écriture pendant plusieurs années. Puis, quand j’étais à l’université, j’ai écrit une nouvelle que j’ai révisée, traduite en français et publiée dans Oscillations. C’est l’histoire de Laura. Ensuite, après mon arrivée en Suisse, j’ai écrit Le papillon qui rêvait de redevenir chenille. Puis, j’ai continué à écrire des nouvelles, un peu à droite, à gauche, mais toujours de manière aléatoire.

– À quel moment as-tu décidé d’écrire pour la jeunesse ?
C’est en 2019 que j’ai commencé à écrire pour les enfants. C’est à ce moment-là que j’ai publié la collection Vie d’Enfant.
Ensuite, j’ai publié Poussière de gratitude, qui a eu un très grand succès.
Et puis cette année, j’ai repris l’univers de Vie d’Enfant pour suivre l’évolution des personnages dans une nouvelle collection : Dix-Gracieux.
C’est une suite logique, parce que ces personnages ont grandi. Maintenant, ils sont adolescents, et j’avais envie de raconter cette nouvelle étape de leur vie.
– Sur quoi travailles-tu en ce moment ?
Je suis en train d’écrire le volume 2 de Dix-Gracieux. C’est un projet qui me tient particulièrement à cœur, parce qu’il aborde des thématiques qui me touchent et qui sont essentielles à mes yeux.
– Quelles sont ces thématiques ?
L’automutilation, d’abord. Quand j’étais plus jeune, j’ai eu une amie qui se scarifiait, et ça m’a marquée. Plus tard, quand je travaillais en unité psychiatrique, j’ai rencontré plusieurs jeunes internés pour cette raison. C’est un sujet qui me touche énormément et que je veux aborder avec justesse et bienveillance.
L’homosexualité féminine aussi. Je trouve qu’on parle beaucoup plus souvent d’homosexualité masculine en littérature jeunesse, alors que les histoires de filles sont beaucoup plus rares. Je veux montrer cette réalité, donner une place à ces histoires d’amour et d’identité qui existent mais qui restent encore trop peu représentées.
Et puis, il y a la relation entre Diana et Gabriel. Dans le premier volume, Diana apprécie Gabriel uniquement quand il prend son traitement pour son TDA. Sinon, elle trouve son comportement insupportable et dérangeant. Dans ce deuxième tome, Gabriel est face à un dilemme : rester lui-même et accepter que leur relation ne fonctionne pas, ou bien essayer de changer pour la reconquérir. Et de son côté, Diana doit aussi se poser des questions : est-ce que ses sentiments sont assez forts pour qu’elle accepte les difficultés liées au trouble de Gabriel ? Ou est-ce qu’elle va, elle aussi, finir par abandonner cette relation ?
– Le TDA est un sujet qui te touche particulièrement, non ?
Oui, c’est un thème qui est très important pour moi, parce que moi aussi, j’ai un trouble de l’attention.
C’est d’ailleurs pour ça que j’ai entrepris une reconversion professionnelle en neuropsychopédologie, et que j’en ai fait mon domaine d’expertise. Je me bats tous les jours contre les symptômes.
C’est quelque chose que je voulais montrer dans le livre : un trouble comme ça, ce n’est pas une maladie, donc il n’y a pas de guérison possible.
Il faut apprendre à faire avec, et ce n’est pas facile tous les jours. Parfois, c’est épuisant. Mais ça ne veut pas dire qu’on est condamné à l’échec ou qu’on doit forcément rentrer dans un moule.
L’idée, c’est de trouver ses propres stratégies pour fonctionner au mieux et s’épanouir malgré tout.
– Ce deuxième volume s’annonce encore plus intense…
Oui, et il va pousser encore plus loin les dilemmes des personnages.
J’ai envie de montrer que l’adolescence, c’est un moment où on se construit, où on se cherche, où on se bat contre soi-même autant que contre les autres.
Et parfois, ce combat dure bien après l’adolescence…
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